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Le Père Tout-Puissant

Sacrifice

 

1 - La présence et l’utilisation du mot « sacrifice » sont telles que plusieurs fiches lui seront consacrées après celle-ci, d'introduction générale.

Il est bien évident que ce mot n’est pas utilisé dans le seul registre religieux. Il faut toujours s’en souvenir. Le mot « sacrifice » peut donc recevoir  des significations très différentes, sources possibles d'incompréhensions.  Dans ces conditions, il ne faut pas oublier que ce sont peut-être des images non-chrétiennes qui surgissent spontanément chez beaucoup à l'énoncé du mot : « sacrifice ». Peut-être certains pensent à : « prix sacrifiés »  « articles sacrifiés » « en faire le sacrifice ». Ce mot implique une idée de perte définitive.

2 - Pour les chrétiens, l'importance de ce mot tient à ce qu'il est associé à l'annonce et à l'explication de l'œuvre du Christ en faveur de l'humanité. Il faut aussi avoir conscience que « sacrifice » peut devenir une occasion de scandale chez les non-chrétiens comme chez les chrétiens eux-mêmes. Enfin, les Églises, séparées au cours des siècles, ne pourront reconstituer leur unité que sur un accord à propos de la signification de ce mot sur lequel se sont polarisées des controverses qui survivent en différences aujourd’hui séparatrices.

3 - La signification religieuse du mot « sacrifice » dépend de la notion que l'on se fait de Dieu. Le mouvement spontané de l'homme, c’est de considérer le sacrifice, comme d'autres rites, comme un moyen pour lui de se rendre maître du divin ou au moins d'empêcher ce divin de lui nuire (« Apaiser »). Ce sens « païen » du mot se retrouve parfois, très normalement, dans la lettre de l'Écriture.  En effet, la Révélation du véritable visage de Dieu lutte sans cesse contre ces conceptions païennes. Il faut donc ne jamais réduire la conception biblique des sacrifices à une conception païenne environnante. Les prophètes d’Israël n’ont cessé de le faire.

4- En Israël, ce n'est pas l'humanité qui paraît l'assaut du divin, mais Dieu lui-même qui vient à la rencontre de l'homme. Le cérémonial des sacrifices est un don de Dieu, chemin rituel et symbolique pour entrer dans sa communion. L'originalité du sacrifice dans la Bible réside moins dans des rites différents que dans le sens donné à ce rituel.

La réalité signifiée par le sacrifice, c'est la communion avec Dieu. Cette communion offerte par Dieu est reçue, acceptée, vécue par le croyant. Le fondement de cette réponse c'est la confiance, la foi envers Dieu. Cette foi est une consécration de la vie : suivre le chemin offert par Dieu. C'est donc sa vie, son existence que le fidèle consacre à Dieu. Le sang, symbole de la vie et donc la traduction de la foi. « Ma vie je te la consacre. » On voit que la mise à mort des victimes n'a pas pour but de satisfaire à une substitution vengeresse, mais de rendre possible le don de sa vie grâce à un symbole. Le but du sacrifice, c'est de réaliser symboliquement la communion avec Dieu dans un repas partagé. Alors qu'en brûlant une partie de la victime, ont fait « monter vers Dieu » une part du repas, le fidèle et les siens sont admis à manger symboliquement à la table de Dieu.

5 - le mot « sacrifice » est peu employé dans le Nouveau Testament pour désigner l'œuvre du Christ. On le chercherait en vain dans la table des mots du Nouveau Testament, édition œcuménique (TOB). La notion, l'idée de « sacrifice », par contre, est bien présente. Il faut le  dire nettement : c'est le Christ et son œuvre qui éclairent la notion de sacrifice et non pas l'inverse. On ne peut donc accéder à  cette notion à coup de fragments ou d’expressions  présentes littéralement certes dans la Bible, mais contestées par les prophètes. « Je déteste […] quand vous faites monter vers moi des holocaustes […] Que le droit jaillisse comme les eaux et la justice comme un torrent. » (Amos, 5, 21)

6 - par contre, le mot « sacrifice » a été et demeure très employé dans la tradition chrétienne. Ce mot faisait partie de la culture religieuse de l’époque. On comprend donc, que, spontanément il ait été employé. Le danger existait  de déformer la conception chrétienne par des représentations païennes. C’est évidemment un danger toujours présent.

7 - la théologie chrétienne du sacrifice a été largement influencée, en Occident, par la pensée de saint Augustin. « Le vrai sacrifice est une action accomplie pour nous faire adhérer à Dieu dans la communion. » « Le sacrifice visible est signe du sacrifice invisible. »  Il n'est aucunement une initiative humaine pour mettre le divin au service de l’homme ; il est réponse à l’appel et à l’amour de Dieu.

8 - le sacrifice est donc un « signe », un acte symbolique : c'est du « visible » pour signifier de l' « invisible ». La communion avec Dieu est figurée symboliquement et réalisée par le fait de manger ensemble.  Le fidèle mange à la table de Dieu. Cette communion offerte par Dieu ne peut être réalisée que dans le don que fait de lui-même, le fidèle. Le sacrifice n'a pas pour but de détruire (tuer, brûler) ; la mise à mort n'est effectuée que pour obtenir le sang, symbole de la vie du fidèle qui veut  consacrer cette vie à Dieu. C'est dire en d'autres termes : «Me voici pour faire ta volonté ;   ta volonté sera la mienne. » La communion dans la volonté  de Dieu est donc essentielle. Sans cet essentiel, il n'y a pas sacrifice mais hypocrisie. La combustion des victimes n'avait pas pour but premier la destruction mais était comprise comme un moyen de faire monter vers la table de Dieu. (He.10)

9 - comme nous aurons l'occasion de le dire par ailleurs il ne s'agit pas ici d'une substitution dans laquelle l'animal immolé remplacerait dans la mort, le fidèle. Dieu serait ainsi  « apaisé » par une substitution : cette notion humaine spontanée existe certes dans les mentalités ;  elle a toujours besoin d'être rectifiée.

« Ce n'est pas l'homme qui va à Dieu pour lui apporter une offrande compensatoire, c'est Dieu qui vient à l'homme pour lui donner [...] Le Nouveau Testament ne dit pas que les hommes se sont réconciliés Dieu [...] Il dit au contraire que « en  Christ, Dieu s'est  réconcilié le monde. » J. RATZINGER, Foi chrétienne, hier et aujourd'hui, (1995, p. 198) bouche conteur au repos